Jean-Patrick COURTOIS, Rapporteur au Sénat pour le projet de loi de réforme des collectivités territoriales

Publié le par J-P. Courtois

 

Le point sur le projet de loi de réforme des collectivités territoriales


Commission saisie au fond                                           : Commission des Lois

Rapporteur au Sénat                                                   : Jean-Patrick COURTOIS (UMP)

Rapporteur pour avis (commission des Finances)         : Charles GUENE (UMP)

Examen en 1ère lecture au Sénat                                    : 19 janvier 2010 au 4 février 2010

 

 

 

I – RAPPEL DES OBJECTIFS PRINCIPAUX DU PROJET DE LOI

- Réorganiser les collectivités autour de deux pôles, un pôle départements-région et un pôle communes-intercommunalité ;

- Simplifier le paysage institutionnel en achevant la couverture intercommunale du territoire national, en élargissant le cadre des intercommunalités, en favorisant les regroupements de collectivités sur une base volontaire et en supprimant les niveaux devenus superflus ;

- Créer des métropoles en offrant à nos grandes agglomérations un nouveau cadre institutionnel plus adapté ;

- Clarifier les compétences des différents niveaux de collectivités et encadrer la pratique des cofinancements.

 

II – TEXTE ADOPTE PAR LE SENAT

 

Le Sénat a adopté, en première lecture, le deuxième volet de la réforme des collectivités territoriales, avec comme mesure phare, la création d’une nouvelle catégorie d’élu, le conseiller territorial.

 

Comme l’a rappelé Alain MARLEIX, Secrétaire d’Etat à l’intérieur et aux collectivités territoriales, « la réforme territoriale conforte les communes, qui ont besoin d’une intercommunalité forte. La réforme vise également à renforcer l’échelon départemental comme l’échelon régional en les recentrant chacun dans leur domaine de compétence spécifique ».

 

Conseiller territorial (article 1)

 

Si le principe des conseillers territoriaux a été acté par la majorité (174 voix contre 156) le débat n’est pas achevé car leur répartition, leurs compétences et leur mode d’élection seront définis dans deux projets de loi ultérieurs (PJL n°61 et 62).

 

Toutefois le Sénat a adopté un amendement centriste précisant que le conseiller territorial sera élu par un scrutin uninominal avec une dose de proportionnelle assurant ainsi la représentation des territoires, de la démographie et de la parité.

 

 

Ce nouvel élu remplacera, en mars 2014, les 6.000 conseillers généraux et régionaux. Il siègera à la fois au département et à la région.

 

Le conseiller territorial est la réponse que le Gouvernement a souhaité apporter au renforcement de la complémentarité de l'action des départements et des régions.

 

Il pourra développer une double vision, à la fois proche des territoires et stratégique, en raison des missions exercées par les régions. Il favorisera la complémentarité entre les départements et les régions en évitant les actions concurrentes ou redondantes des deux collectivités.

 

Les conseillers territoriaux seront moins nombreux, 3 000, au lieu des 6 000 élus actuels au niveau départemental et régional.  Ils seront deux fois plus puissants et deux fois plus performants.

 

 

 

 

Conseils communautaires (articles 2, 3, 3bis et 37)

 

Le Sénat a voté le principe de l'élection des conseillers communautaires au suffrage universel direct, pour toutes les communes dont le conseil municipal est élu au scrutin de liste.

 

Désormais, leur élection aura lieu dans le cadre des élections municipales, par un système de "fléchage" (pour les communes de plus de 3.000 habitants), amenant les premiers de liste à siéger à la fois au conseil municipal et au conseil communautaire.

Comme l’a rappelé Brice Hortefeux,  « le Gouvernement a fait ce choix car il ne souhaitait pas porter atteinte à la légitimité du maire qui aurait été concurrencée si l'on avait retenu la désignation des conseillers communautaires par un scrutin autonome. Cette solution, était d'ailleurs celle du rapport MAUROY, dans sa proposition n°7, voici déjà 10 ans".

 

Le Sénat a décidé de permettre, dans les communautés de communes et les communautés d'agglomération, qu’une commune qui ne dispose que d'un seul délégué, puisse désigner un délégué suppléant qui participe avec voix délibérative aux réunions de l'organe délibérant, en cas d'absence du délégué titulaire et si celui-ci n'a pas donné procuration. 

 

Le Sénat a par ailleurs prévu que la répartition des sièges se ferait, dans les communautés de communes et les communautés d’agglomération

 

-         par accord local des deux tiers au moins des conseils municipaux des communes intéressées représentant la moitié de la population ou de la moitié des conseils municipaux des communes intéressées représentant les deux tiers de la population. Comme l’a rappelé Jean-Patrick COURTOIS, rapporteur, « il faut privilégier les accords locaux qui garantissent une répartition équitable entre les communes ».

-         à défaut d’accord, les sénateurs ont prévu, sur proposition de Pierre Hérisson (Haute-Savoie) et Gérard Collomb (PS), l’application d’un tableau de répartition des sièges en fonction de la population, avec au moins un siège pour chaque commune et en évitant que la commune centre ne soit majoritaire.

 

 

Le Sénat a introduit :

-         un article 3bis visant à favoriser la parité au sein des organes délibérants des EPCI.

-         un article 5A modifiant les règles de majorité applicable à la création d’une communauté d’agglomération, d’une communauté urbaine ou d’une métropole, en intégrant dans la majorité requise, les communes dont la population est supérieure au tiers de la population totale, et non plus seulement celles dont la population est supérieure à la moitié de la population totale, ou, à défaut, la, plus importante.

 

Métropoles (articles 5, 5bis, 5ter, 6, 6 bis)

 

Le Sénat a créé une nouvelle catégorie d’EPCI à fiscalité propre : les métropoles. Elles regrouperont des communes d’un seul tenant et sans enclave, représentant plus de 450 000 habitants.

 

Le Sénat a souhaité maintenir, à l’unanimité, l’autonomie fiscale des communes au sein des futures métropoles, alors que le texte proposé par le Gouvernement prévoyait que le pouvoir de lever l’impôt soit transféré à la métropole.

 

Les charges correspondant à l'exercice des compétences transférées font l'objet d'une évaluation préalable au transfert desdites compétences. « Il est créé une commission locale pour l’évaluation des charges et des ressources transférées. Elle est composée paritairement de représentants de la métropole et de représentants de la collectivité qui transfère une partie de ses compétences à la métropole ».

 

 

 

 

 

 

Communautés d’agglomération (article 6ter)

 

Le Sénat a permis de réduire, pour la création d’une communauté d’agglomération, le seuil démographique de 50 000 habitants à 30 000 habitants, lorsque celle-ci comprend le chef-lieu du département. 

 

Le seuil démographique peut également être apprécié en population "dotation globale de fonctionnement" si, cumulativement, la population "dotation globale de fonctionnement" l'excède d'au moins 20 % et si la population "dotation globale de fonctionnement" majore de plus de 50 % la population totale (données INSEE). 

 

 

 

Les pôles métropolitains (article 7)

Le Sénat a également créé le pôle métropolitain, établissement public constitué par accord entre des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, en vue d'actions d'intérêt métropolitain en matière de développement économique, de promotion de l'innovation, de la recherche et de l'université, de la culture, d'aménagement de l'espace afin de promouvoir un modèle de développement et d'améliorer la compétitivité et l'attractivité de son territoire.

Les organes délibérants de chaque établissement public de coopération intercommunale se prononcent, par délibérations concordantes, sur l'intérêt métropolitain des compétences transférées au pôle métropolitain.

Sa création fait l'objet d'une consultation préalable avec les régions et les départements concernés.

Le pôle métropolitain regroupe des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre formant un ensemble de plus de 300 000 habitants. L’un d’entre eux compte plus de 150 000 habitants.

 

 

Communes nouvelles (articles 8 à 11bis)

 

Le Sénat a entériné le principe de rénovation du dispositif de fusion des communes par l'institution des communes nouvelles.

 

Elles peuvent être créées :

-         Soit à la demande de tous les conseils municipaux ;

-         Soit à la demande des deux tiers au moins des conseils municipaux des communes membres du même établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, représentant plus des deux tiers de la population totale de celles-ci ;

-         Soit à la demande de l’organe délibérant d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, en vue de la création d’une commune nouvelle aux lieu et place de toutes ses communes membres ;

-         Soit à l’initiative du représentant de l’État dans le département.

 

Dans tous les cas, la création de la commune nouvelle est subordonnée à la consultation des personnes inscrites sur les listes électorales municipales dans chacune des communes concernées sur l’opportunité de la création de la commune nouvelle.

 

Le Gouvernement devra remettre au Parlement, avant le 31 décembre 2010, un rapport établissant la liste des ressources financières dont les communes qui décident de se regrouper au sein de communes nouvelles pourraient perdre le bénéfice, en raison notamment des dépassements de seuils démographiques résultant de leur regroupement.

 

 

 

Regroupements de départements et de régions (articles 12, 12bis, 13 et 13 bis)

 

Le Sénat a fortement encadré la fusion des départements et des régions, en rendant obligatoire son approbation par les assemblées locales et les populations concernées : « à la demande de leurs conseils généraux, des départements formant un territoire continu peuvent être regroupés en un seul. En cas de délibérations concordants de l’ensemble des conseils généraux intéressés, le gouvernement ne peut donner suite à la demande qu’avec l’accord des personnes inscrites sur les listes électorales des communes appartenant à ces départements ».

Le Sénat a par ailleurs entériné le nouvel article 13bis, introduit par la commission des lois, qui permet aux régions de « demander par la loi à fusionner avec les départements qui la composent ».

 

Développement et simplification de l’intercommunalité

 

·        Le Sénat a entériné la légalisation du schéma départemental de la coopération intercommunale (article 16). La Haute assemblée a rétablit l'orientation fixée au schéma de constituer des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) d'au moins 3.000 habitants (au lieu de 5.000 prévu par le Gouvernement). Toutefois, le représentant de l'État dans le département pourra retenir un seuil de population inférieur pour tenir compte de la spécificité de certaines zones.

 

Le Sénat a introduit la possibilité pour deux communes (des départements de Paris, du Val-de-Marne, des Hauts-de-Seine et de Seine-Saint-Denis) non contiguës, parce qu'elles sont séparées par un bois appartenant à une commune tierce qui n'est pas comprise dans le périmètre d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, de constituer entre elles, et éventuellement avec d'autres communes, un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.

Lorsque le représentant de l'État dans le département constatera qu'une commune n'appartient à aucun EPCI à fiscalité propre ou crée à l'égard d'un tel établissement existant une enclave ou une discontinuité territoriale, il pourra rattacher, par arrêté, cette commune à un EPCI à fiscalité propre, après accord de son organe délibérant et avis de la commission départementale de la coopération intercommunale, qui disposent d'un délai de trois mois à compter de la notification par le représentant de l'État dans le département pour se prononcer.

 

En cas de refus de l'organe délibérant de l'établissement, le préfet ne peut pas opérer le rattachement si la commission départementale de la coopération intercommunale s'est prononcée, à la majorité des deux tiers de ses membres, en faveur d'un autre projet de rattachement à un EPCI à fiscalité propre limitrophe de la commune concernée.

 

En cas de divergence sur le futur périmètre d'une communauté de communes entre une collectivité classée montagne et le représentant de l'État dans le département, la décision finale est prise après consultation du comité de massif.

 

·        Concernant la procédure de fusion des EPCI (article 20), le Sénat a souhaité préciser que l’on ne peut obliger deux communautés de communes à fusionner s'il n'y a pas un accord des conseils municipaux et de la population. « Cette majorité doit nécessairement comprendre au moins les deux tiers des conseils municipaux des communes représentant la moitié de la population, ou la moitié des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population, qui sont regroupées dans chacun des établissements publics de coopération intercommunale dont la fusion est envisagée ».

 

·        S’agissant des pays (article 25), le Sénat a précisé que les contrats conclus par les pays antérieurement à l’abrogation de l’article 22 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire (concernant la création d’un cadre juridique pour les pays) seront exécutés dans les conditions antérieures jusqu'à leur échéance.

 

·        Concernant la composition de la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI) (article 26), le Sénat a validé la position de la commission des lois qui créé un collège spécifique aux syndicats qui comprendra 5 % des sièges et, en conséquence, abaisse de 15 à 10 % les sièges détenus par les départements ;

Dans les départements ayant des zones de montagne, la composition des collèges des représentants des communes et EPCI de la CDCI est calculée à la représentation proportionnelle des communes et des EPCI classés « montagne ».

 

·        Le Sénat a souhaité réaffirmé le principe de non tutelle financière d'une collectivité sur une autre (article 28), et a étendu aux associations l'interdiction faite aux collectivités de conditionner l'octroi d'une subvention à une autre collectivité à son appartenance à un syndicat mixte ou un EPCI ;

 

·        Concernant la dissolution et la liquidation des EPCI (article 28bis), le Sénat a adopté de nouvelles dispositions ayant pour but d'encadrer juridiquement la dissolution/liquidation des EPCI en instituant une procédure en deux étapes : le premier arrêté (ou décret) prononce la fin de l'activité de l'EPCI, le second vise à prononcer sa dissolution.

Ainsi, plusieurs nouveautés :

- le maintien de la personnalité morale de l'EPCI pour les besoins de sa dissolution permettant de sécuriser le paiement des dépenses pendantes ;

- l'intervention d'un liquidateur de manière systématique au plus tard au 30 juin de l'année suivant celle où été pris le premier arrêté (ou décret) mettant fin à l'activité de l'EPCI ;

- l'adoption d'un budget de liquidation et le raccrochement au droit du contrôle budgétaire permettant la saisine de la chambre régionale des comptes en cas de défaillance de l'organe délibérant.

 

·        S’agissant des procédures exceptionnelles d'achèvement et de rationalisation de la couverture du territoire en EPCI à fiscalité propre et en syndicats (articles 29 et 30), le Sénat a entériné la position de la commission des lois qui a prévu que les modifications adoptées par la CDCI à la majorité des deux tiers s'imposent à la décision préfectorale.

Par ailleurs, dans cette période, la création, la modification et la dissolution d’un EPCI à fiscalité propre est prononcée par arrêté du ou des représentants de l’État dans le ou les départements intéressés après accord des conseils municipaux des communes intéressées. Cet accord doit être exprimé par la moitié au moins des conseils municipaux des communes intéressées représentant la moitié au moins de la population totale de celles-ci, y compris le conseil municipal de la commune dont la population est la plus nombreuse.

 

·         Le Sénat a préservé le caractère facultatif du transfert des pouvoirs de police du maire au président de l'EPCI dans certains domaines (article 31).

 

·        La Haute assemblée a permis d'instaurer, sur la base du volontariat, une Dotation Globale de Fonctionnement (DGF) dite « territoriale » à l'échelle des communautés (article 34quater). Compte tenu de son caractère expérimental,  cette faculté doit être instaurée à l'unanimité du conseil communautaire et de chaque commune membre. Les conditions de sa mise en œuvre sont définies par le conseil communautaire, statuant à la majorité qualifiée des membres présents.

 

·        S’agissant de la répartition des compétences des régions et des départements (article 35), il est prévu que, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, une loi précise la répartition, ainsi que les règles d’encadrement des cofinancements entre les collectivités territoriales, en application des principes suivants :

        la région et le département exercent, en principe exclusivement, les compétences qui leur sont attribuées par la loi ; dès lors que la loi a attribué une compétence à l’une de ces collectivités, cette compétence ne peut être exercée par une autre collectivité ;

        la capacité d’initiative de la région ou du département ne peut s’appliquer qu’à des situations et des demandes non prévues dans le cadre de la législation existante, dès lors qu’elle est justifiée par l’intérêt local et motivée par une délibération de l’assemblée concernée ;

        lorsque, à titre exceptionnel, une compétence est partagée entre plusieurs niveaux de collectivités, la loi peut désigner la collectivité chef de file chargée d’organiser l’exercice coordonné de cette compétence ou donner aux collectivités intéressées la faculté d’y procéder par voie de convention ; la collectivité chef de file organise, par voie de convention avec les autres collectivités intéressées, les modalités de leur action commune et de l’évaluation de celle-ci ;

        la pratique des financements croisés entre les collectivités territoriales est encadrée afin de répartir l’intervention publique en fonction de l'envergure des projets ou de la capacité du maître d’ouvrage à y participer. Le département continuera à être identifié comme le lieu des politiques publiques de proximité et sera confirmé dans son rôle de garant des solidarités sociales et territoriales.

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